A PROPOS DE L’ŒUVRE D’ART

A PROPOS DE L’ŒUVRE D’ART :

Je pense qu’on a rien inventé. Tout était là. Depuis, on a fait que parfaire des techniques. “Claude Viallat”.

Sachez que je n’invente rien, je le redécouvre. Parler de soi, quand nous sommes artistes plasticiens, n’est pas facile, l’œuvre parle à notre place, souvent il nous manque les mots….   Mon travail est lent à élaborer, il se peut parfois qu’une série mette deux ans avant qu’il n’y ait le déclic qui donne enfin un sens à l’œuvre et qui ne soit pas seulement une projection de mon petit ego. Ou bien il me vient d’un coup une foule de données et d’envies et je “sors” ce que j’attrape avec ferveur sans relâche jusqu’à ce que la “veine” soit épuisée.

Ma peinture se renouvelle et évolue sans cesse, touche à tout, je ne peux la réduire dans une forme ou une autre. Il m’est toujours nécessaire de passer d’une technique à une autre par exemple : La peinture à l’huile, à l’eau, le dessin, la photo, le graphisme sur ordinateur, la gravure, ainsi que la sculpture céramique. Je passe d’un mode à un autre, figuratif, abstrait, selon mes sujets et mes préoccupations plastiques.

J’ai eu tout au long de ma vie l’occasion d’expérimenter ces diverses approches, trouvant ici ou là, des pistes de travail que j’explore. J’oriente actuellement mes recherches sur et avec le matériau papier qui ouvre des possibilités innombrables, du dessin à la gravure, des encres de chine à l’acrylique, du collage au livre d’artiste.

J’ai consacré  les deux tiers de ma vie à enseigner, aujourd’hui, j’ai enfin le temps d’approfondir ces richesses techniques acquises, le temps aussi de chercher en moi ce que la vie m’a laissé en héritage pour y puiser mon inspiration.

L’OEUVRE D’ART

Quel harpon lancer qui tende jamais un filin entre ces deux inconnaissables, l’UN et l’INFINI ? Il existe pourtant, c’est l’œuvre d’Art. Elle est nous, lisiblement, Elle est ce qui n’est pas nous, visiblement.

L’œuvre d’Art donne accès à l’absolu. L’œuvre d’Art est un pont, une porte. Elle saisit l’insaisissable, fixe le fugitif, le concrétise dans la matière transformée pour devenir une inquantifiable parcelle d’INFINI.

Peintre-artisan, ton geste sacré permet de faire passer ce mince filet de lumière qui parle de l’INFINI.

L’œuvre parle de ce qui relie. Ce qui relie les autres aux artistes, qui relie aussi tous les autres ensemble, comme une connivence. Une communication hors parole, seulement celle du cœur, qui relie aussi à tout ce qui est de l’ordre du sacré, des archétypes, et du Divin qui est en nous, même si nous ne le savons pas.

Mon devoir de peintre-artisan est d’être à l’écoute de cet infini et de le transmettre. À l’écoute de moi que je dois découvrir chaque jour avec peine.

Peindre c’est méditer, s’interroger, jouer avec les couleurs, la lumière, et faire passer une émotion. Peindre est une expérience. Je ne sais jamais où me conduit ce que j’esquisse sur la toile. Le sujet m’emporte et je laisse mon intuition me guider. Peindre pour saisir la matière, la palper, la mettre en forme. Et la forme vient de l’intérieur, de la mémoire, du vécu. Peindre c’est ouvrir la voie aux questionnements de l’esprit. Et le miracle se produit quand la technique s’accorde aux exigences de l’esprit.

L’IMAGE, UNIQUE, INSCRITE DANS UN TOUT…

Je tiens à ce que mes tableaux aient une présence, qu’ils magnifient l’espace, qu’ils apportent une sensation de bien-être dans le cœur. Un détail inattendu, une forme, une vibration particulière de la couleur soutiennent cette quête de transgression de la frontière subjective entre la représentation figurative et l’enveloppe abstraite. De la fusion des deux genres, naissent, explosent les émotions que j’ai cherché à faire transparaître.

Par ailleurs, je vais de plus en plus rechercher le fondement d’un habillage abstrait, source de liberté gestuelle et plus sujet aux symboles.

Ma démarche embrasse le monde initiatique du rêve, de l’âme, de la sensualité et de la sensibilité à travers ma nature profondément féminine, curieuse et mystérieuse.

Telle cette vielle femme qui marche dans la neige et le froid pour rejoindre sa maison, une démarche artistique s’élabore avec le temps, par les temps de jachères comme de moisson, il ne faut pas avoir peur des difficultés, des doutes, des questionnements. La route est longue pour atteindre la maturité. Les choses arrivent quand on ne s’y attend pas.

Artistes et femmes nous sommes le réceptacle, la coupe prête à recevoir ce qui vient. Patience et humilité, persévérance et confiance, sont l’humus pour accueillir cette graine de sacré, que nous avons le devoir de protéger en notre sein, afin qu’elle s’éveille et prenne vie pour naître à la lumière.

Il nous incombe de veiller : Que ce qui nous a été donné soit bon pour les hommes et les femmes, qu’ils s’en nourrissent pour percevoir et ressentir la joie.

Anne Poupard