Impressions cousues – Couture cicatricielle J’ai emporté de maison en maison, un trésor de guerre depuis plus de 40 ans. Une cantine métallique bleue protégeait des tirages de gravures que je faisait lorsque j’étais aux Beaux arts de Marseille puis plus tard dans mon atelier à Valence. Ce trésor je n’ai jamais voulu y toucher jusqu’à ce que je pose enfin mes valises en Drôme provençale.
Voici en quelques mots le propos de mon travail d’alors : 1974 : Base carrée, rouge agressif et noir endeuillé, blessures pansées.
IMPRESSIONS DE TARLATANE
Carré blanc, référentiel, symbole de l’arrêt, instant prélevé, moment stabilisé. Papier, espace d’apparition, sujet vierge, potentiel neutre. Rouge, première des couleurs, fondamentalement liée à la vie. Rouge diurne, centrifuge, solaire, force vitale, beauté, impulsion, passions. Rouge fascinant, gueule agressive et avide. Rouge nocturne, femelle, centripète, lunaire, couleur de l’âme cachée. Rouge, condition de la vie, blessure, sang versé. Tarlatane, tissus aérien, translucide, légèreté, soupir, protection, pansements, tampon. Traces enregistrées jusqu’à disparition, jusqu’à effacement. Passages successifs sous presse sans ré-encrer la matrice. Tissus, papiers, souples réceptacles, s’imbibent, s’imprègnent, s’impriment, captent les empreintes.
2010-2011 : REPRISE D’UN TRAVAIL INACHEVÉ, IMPRESSIONS COUSUES
Je trouvais ce travail plastique un peu maladroit, un peu trop « jeune », mais j’aimais beaucoup les matières des impressions. En 2010 j’ai trouvé quoi en faire. Je les ai découpées en petites séquences. Privilégiant les plus beaux morceaux. Puis j’ai cherché une harmonie, une composition, je les ai assemblés en les cousant à la machine. J’ai cousu des centaines de petits carrés rouge, noir et blanc. Je les ai assemblés en composition par 9, sur un support carré blanc. Chaque carré de mes collages est un morceau achevé d’une histoire globale qui ne peut se raconter qu’à travers des formes émiettées où miroite l’idée pleine de l’ensemble. Ce travail a consisté à sortir de ma boite de Pandore les vielles blessures anciennes afin de les recoudre, de les cicatriser enfin et de guérir. J’ai enfin recousu les morceaux.